Tyrone Laner

Sur la piste du Cirque d'Hiver, je vais marcher dans les pas de mes ancêtres

7e génération du nom, Tyrone Laner va faire honneur à ses ancêtres qui ont foulé la piste du Cirque d’Hiver-Bouglione. Avec sa partenaire, Margo, danseuse et chorégraphe ukrainienne, qui s’est convertie aux arts du Cirque par amour, ce gladiateur des temps modernes présente un numéro de lancer de couteaux digne du cinéma. Rencontre avec un enfant de la balle et jeune marié !

Tyrone, c’est un nom de scène parfait pour l’international !

Pas du tout. C’est mon vrai prénom ! Ma mère l’a choisi car elle était une grande fan de l’acteur américain Tyrone Power (Ndlr : descendant d’une lignée de comédiens, il a joué notamment Sous le signe de Zorro).

Vous êtes né à Majorque, mais vous n’y êtes jamais. Vous menez une vraie vie de saltimbanque !

Oui, c’est précisément ce que j’aime dans notre métier. C’est vrai, j’ai la chance de connaître beaucoup de cultures différentes… Je vis où les contrats me mènent. Quand Margo et moi, nous jouons à Berlin, c’est plus pratique de louer un appartement à Berlin, que ce soit pour quelques semaines ou plusieurs mois, en attendant la prochaine destination ! Nous nous déplaçons dans une grande voiture avec une remorque qui contient tout le matériel, mais nous sommes bien organisés !

Vous n’avez jamais envisagé une autre voie que celle de vos parents, grands-parents, arrière grands-parents…

Certainement pas ! Dans la famille, on est artistes de cirque depuis 7 générations. Mon père, né dans une caravane en bois, a passé sa vie à jouer les cow-boys, lasso en main, pour exécuter son numéro de lancer de couteaux ; il faisait de la voltige acrobatique avec les chevaux. L’univers des « westerns spaghetti » le fascinait totalement.

Vous avez choisi la discipline de votre père, pas celle de votre mère !

Et pour cause ! Ma mère était perchiste ; elle performait avec mon grand-père qui tenait la perche sur sa tête tandis qu’elle exécutait des acrobaties. Mes parents m’ont toujours inspiré mais je n’aurais jamais pu imiter ma mère, je ne suis pas du tout à l’aise en hauteur !

Quand avez-vous fait vos débuts sur la piste ?

Tout petit, je me souviens que mes parents se produisaient dans un cirque en Hollande ; ils m’avaient confié le rôle de clown de reprise. Vêtu d’un costume de clown pour enfant, j’occupais le public entre deux numéros pendant que les garçons de piste mettait le matériel en place.

Le lancer de couteaux, c’est dangereux. Vous n’avez jamais eu d’accident ?

Si, j’ai déjà été blessé. Avec mon frère Michael, qui a choisi la même discipline que moi, on a l’habitude de faire des duels. En répétant nos battles, j’ai pris un couteau dans le coude. Ça arrive souvent, mais ce sont des estafilades. Les acrobates se blessent en tombant pendant les répétitions. Nous aussi !

Et puis Margo est arrivée et elle est devenue votre partenaire et épouse…

Oui, nous sous sommes rencontrés il y a presque 3 ans et nous nous sommes mariés en septembre 2024. Nous jouions en Allemagne dans Roméo et Juliette, une version contemporaine adaptée pour les dîners-spectacles. J’incarnais Tybalt, le cousin de Juliette alias Margo qui est toujours prêt à se battre en duel.

Encore de la bagarre !

Vous savez quand j’ai fait évoluer mon numéro pour intégrer Margo, beaucoup de femmes m’ont dit : « Ce n’est pas bien de prendre une femme pour cible ! ». Mais Margo n’a rien d’une victime ni d’un faire-valoir ! J’ai trouvé que ce serait cool de casser les codes. Elle s’est entraînée, a passé sa licence de tir à l’arc et peut me viser avec son arbalète et décocher des flèches à 30 mètres !

Votre look de bad boy est très réussi. On n’aimerait pas vous croiser dans un tunnel !

(Éclats de rires) Ça, c’est le maquillage et le costume noir qui installent une atmosphère censée effrayer. Dès que j’ai commencé en 1999, je n’ai cessé de peaufiner mon personnage.

J’ai souhaité sortir du schéma classique, être plus actuel avec des références plus récentes. J’aime les films d’action américains, les productions Marvel, les super-héros et surtout les pirates… Mon personnage de gladiateur moderne et extravagant s’est inspiré de tout ça et la magie dont je suis fan ; mon oncle était magicien à Las Vegas et ami de Siegfried et Roy, des as en la matière.

Voyager dans le monde entier avec des armes blanches doit provoquer des situations embarrassantes !

Oui (rires) ! Il arrive qu’à la douane je me fasse contrôler et que je doive demander à mon agent d’envoyer en urgence les photos de mes spectacles et mon contrat. Voyager avec 40 couteaux et du matériel pyrotechnique, ça peut surprendre et surtout inquiéter ! Une fois que j’ai pu prouver que je suis un artiste et que les armes blanches emportées dans mes bagages servent à mon numéro… et à rien d’autre, ça va mieux. En général, ça se passe bien. Les gens sont fascinés et posent plein de questions. Un jour, cependant, j’ai eu la mauvaise surprise, au moment de récupérer mes valises, de constater que mes couteaux avaient disparu. Au scanner, la police aux frontières les a vus et n’a pas autorisé leur mise en soute. C’était à l’aéroport de Londres, où je me rendais pour participer à Britain’ s got talent (La Grande-Bretagne a un incroyable talent), quelques jours après qu’un policier a été tué à coups de couteau pendant une vague d’attentats. Depuis ce temps-là, je voyage toujours avec mon contrat !

Fouler la piste du Cirque d’Hiver, c’est le rêve de tout artiste de cirque, non ?

Oui, bien sûr, mais pour moi, cela va au-delà ! Plusieurs membres de ma famille s’y sont produits par le passé et je vais avoir une pensée émue pour eux. Mon arrière-grand-père a succombé à une crise cardiaque au Cirque d’Hiver. Quelle belle mort pour un artiste ! Et, ma grande-tante, Cipriana Portner, a participé au tournage de Trapèze avec Burt Lancaster et Gina Lolobrigida dont une partie s’est déroulée au Cirque d’Hiver. Elle était la doublure de Katy Jurado qui incarnait Rosa, une acrobate, dans le film. En présentant mon numéro chez les Bouglione, je vais marcher dans les pas de mes ancêtres.